Olivier Guérin est Vice-Président de la SFGG et médecin-gériatre au CHU de Nice.
Pour aider les futurs internes à choisir leur spécialité, il nous éclaire sur ce métier méconnu et résolument tourné vers l'avenir.

 

L’heure est au choix de la spécialité pour les futurs internes. Choisir la gériatrie, c’est s’inscrire dans l’avenir, pourquoi ?

 

Le sujet central c’est l’évolution du système de santé.

De plus en plus, la gestion de la santé va être globalisée avec des éléments de prévention primaire (éviter l’apparition des maladies, notamment chroniques, ou la retarder) et secondaire (éviter les décompensations deces maladies chroniques). C’est cette prévention secondaire que les gériatres prennent en charge en premier lieu, même s’ils sont aussi très intéressés par la prévention primaire.

Notre but, en tant que gériatres, est que les concitoyens vivent le plus longtemps possible en meilleure autonomie possible, malgré leurs maladies.

 

Dans 10 ans le gériatre verra son rôle accroître à l’hôpital contrairement à d’autres métiers qui sont appelés à avoir moins de place (toutes les spécialités d’organe notamment). Pourquoi ?

 

La gériatrie est un des métiers d’avenir parce qu’elle allie les dimensions humaines et sociales. Demain, des algorithmes et des machines interprèteront les résultats et aideront à la décision. C’est ce qu’on appelle la disruption numérique. Par exemple, les anatomopathologistes (c’est déjà le cas) bénéficient de la lecture automatisée des lames. Les disciplines dites d’organe sont vouées à être moins nombreuses, y compris en ville, au profit de spécialités plus vastes et plus intégratrices avec une vision globale du patient.

L’évolution des besoins de santé publique fait que le nombre de patients âgés et polypathologiques ne va faire qu’augmenter, et les gériatres sont naturellement les mieux formés pour cette prise en charge globale, hiérarchisée. L’enjeu n’est pas de guérir les maladies chroniques (ça n’est pas possible). Et c’est bien le rôle du gériatre que d’avoir les compétences pour appréhender cette complexité, qui fait que si vous traitez votre patient qui présente 4 ou 5 maladies chroniques selon les recommandations édictées pour chacune d’elles, vous pouvez tuer votre patient par iatrogénie.

 

Choisir une spécialité c’est un choix qui vous engage 40 ans…

 

Dans leurs études médicales on ne dit jamais aux étudiants que finalement ils choisissent un métier pour 40 ans.
Or les métiers évoluent.
Il faut voir loin, se projeter et se poser la question de la place de la spécialité médicale dans le système de santé de demain. C’est assez classique de choisir un métier connu en ayant l’impression qu’il ne va jamais changer. Mais c’est une erreur. La gériatrie est un métier utile qui va profondément changer et se moderniser et qui va prendre une place croissante.

 

 

Quel est le plus gros atout de la gériatrie ?

Incontestablement la variété du métier de gériatre.

Il peut être confronté dans la même journée à de la réanimation gériatrique (médecine technique), du post-urgence et des soins de réadaptation (récupérer l’autonomie perdue).

On voit toutes les pathologies possibles. C’est une médecine hospitalière très polyvalente et dédiée à nos patients âgés, qui sont les plus nombreux et les plus complexes. C’est également une filière qui englobe des métiers différents. Qui plus est, on ne travaille pas seul : on travaille avec des diététiciens, des kinés, des orthophonistes, des assistants sociaux. Le champ est très vaste.

 

Finalement la gériatrie n’est pas la discipline que l’on croit…

C’est une médecine globale où on ne se focalise pas sur un petit bout du patient mais on appréhende le patient dans sa globalité. C’est pour cela que c’est une discipline exigeante et enrichissante.

Elle correspondra en plus parfaitement aux futurs médecins qui cherchent un intérêt humain dans la relation médecin / patient. Dans la gériatrie, contrairement aux autres disciplines, la relation n’est non pas bi-partite (médecin / patient) mais tri-partite comme les pédiatres (médecin, patient, famille).

De plus, les enjeux de recherche sont colossaux. Tant dans les disciplines biologiques (connaissance des mécanismes du vieillissement) que dans les approches des sciences humaines et sociales (psychologie, épidémiologie, sociologie, anthropologie, économie, droit, philosophie,…). Tant de domaines à défricher dans l’abord du vieillissement !

Les gériatres sont des spécialistes des maladies du vieillissement et de l’impact qu’elles ont sur l’autonomie du patient. Avec l’aide des familles, ils soignent et accompagnent les patients. Comment faire pour qu’un grand-père continue à aller chercher ses petits-enfants à l’école : voilà la philosophie du gériatre dans sa prise en charge !

Passionnant, donc.

 

Plus d'infos sur le métier de gériatre : www.devenirgeriatre.org