Pr Gaëtan Gavazzi, Président du Collège National des Enseignants en Gériatrie (CNEG), infectiologue et médecin gériatre au Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble fait le point sur le choix des spécialités des futurs internes en médecine.
En tant que Président du Collège National des Enseignants en Gériatrie (CNEG), vous suivez de près les pré-inscriptions des futurs internes en médecine. Quelle tendance se dégage actuellement ?
Les volumes de pré-inscriptions sont à peu près équivalents à ceux de l'année dernière mais cette année, semble-t-il, la gériatrie est plus choisie en premier choix. Il existe toujours un gradient nord / sud net : certaines villes comme pour les autres spécialités sont plus attractives en raison de leur situation géographique. Elles sont donc pourvues plus rapidement notamment par ce que le nombre d'internes y est faible.
Néanmoins il existe des déséquilibres de postes de gériatres entre les villes. Pour nous c’est une chose incompréhensible : malgré les liens que nous avons tissés avec l'Office National de la Démographie des Profession de Santé (ONDPS), les postes proposés ne sont pas cohérents : 5 postes à Bordeaux et 6 à Limoges, 6 à Poitiers et 7 à Dijon et autant à Nantes, 4 postes à Marseille.
Nous ne manquerons pas de faire un retour de nos remarques, de la part du CNEG et à l'issu des choix, auprès des Ministres de tutelle (Enseignement Supérieur et Santé).
En quoi la discipline "gériatrie" est attractive pour de jeunes médecins ?
Nous le saurons très bientôt : une enquête nationale auprès des internes ayant choisi la discipline en 2017 est en cours. Une autre a débuté auprès des étudiants en cours de choix, j'invite d’ailleurs tous les étudiants à y participer. Les étudiants choisissant la gériatrie sont des personnes aimant le raisonnement médical, la prise en charge globale des individus, le sens du service rendu, les histoires, le travail en équipe mais aussi pour certains je pense la recherche dans des situations complexes.
Pour certains le choix de la ville, plus que la spécialité elle-même, joue un grand rôle. Il faut donc les convaincre de leur bon choix grâce à un enseignement irréprochable.
La formation des internes est capitale. Qu'est-ce qui distingue la formation en gériatrie d'une autre discipline ?
Elle offre comme toutes les autres formations une connaissance large, multiple et précise et un accès aux techniques le plus innovantes (e-learning).
Elle se distingue des autres formations car au fur et à mesure, il apparaîtra à chaque étudiant que le sens clinique à développer sera d'être en capacité de faire une analyse fonctionnelle de l'ensemble, de chacune des pathologies, de hiérarchiser les prises en charge les plus rentables pour proposer des soins les plus individualisés et appropriés à l'environnement du patient. Il s’agit non pas de traiter une maladie mais une des maladies et un malade dans l'ensemble, dans toutes ses dimensions santé, psychique et environnementale.
Être gériatre c’est acquérir à la fois toute la technicité des spécialités d'organe, en collaboration avec les spécialités d'organes et les capacités de synthèse et de fonctionnement pluridisciplinaire. Un vrai challenge de complexités.
Pour cela il faut être très bon sur les diagnostics des pathologies le plus fréquentes même dans leurs évolutions les moins fréquentes, mais aussi savoir se laisser étonner par les présentations les plus inhabituelles de pathologies plus rares. Savoir quand collaborer efficacement avec les autres disciplines est également important.
L'organisation de l'enseignement et la proximité avec les étudiants sont nos priorités. Le rétro-enseignement des phases d'e-learning étant un des points essentiel sur lequel les enseignants se sont engagés dans la quasi totalité des villes. Cela continuera dans les années à venir avec une volonté d'homogénéisation et de partenariat avec les internes DES de gériatrie.
Avec la Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG) et l'Association des Jeunes Gériatres (AJG) vous avez mené une campagne de promotion de votre discipline. En quoi était-ce important ? Pourquoi l'avoir fait ? Et quels retours avez-vous eus ?
Les retours sont excellents pour l'instant.
L'objectif était de faire mieux connaître ce qu'est une personne âgée, l'hétérogénéité de ce que représente cette population si mal définie par le terme "population âgée", certains "jeunes" étant certainement plus « vieux » que certains de nos patients ! Notre souhait était également de faire connaître la discipline en tant que nouvelle discipline orientée vers un avenir de problématiques infinies à explorer, tant au niveau de la recherche que le soin mais aussi sur les aventures humaines qu'elle nous permet de vivre.
Quelles ambitions avez-vous pour les futurs internes en gériatrie ? Quelle place leur allouer dans la discipline ?
Les projets sont nombreux et s'intègrent tous dans les futurs métiers et organisations, avec la volonté d'individualiser au mieux les parcours, jusqu'à l'international.
Sur le plan général, nous souhaitons lors d'une première journée nationale, qui aura lieu fin novembre, inviter les internes à fonder une association qui permettra un travail collaboratif (meilleures adaptations des enseignements notamment sur le terrain clinique mais aussi permettre les ouvertures vers la recherche qu'elle soit fondamentale, clinique ou en sciences sociales) ainsi qu'une représentation régulière au CNEG. Elle devra aussi se faire entendre auprès de l'ISNIH, en terme de représentation et porter du côté des internes les revendications de la médecine gériatrique.
Dans quelques années ce collectif regroupera plus de 800 internes en France.
C'est ainsi que l'on peut imaginer le lit d'une formation la plus complète, évolutive, moderne, mais qui sera initiale, donnant envie à chacun de porter haut les couleurs de la gériatrie ET de nos aînés.