France Alzheimer et maladies apparentées et la Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG) tiennent à exprimer leur déception suite à la décision du Conseil d’Etat de rejeter le recours qui avait été déposé le 2018 par l’Association et sept autres organisations savantes*.

Le résultat est donc tombé le 16 décembre et le Conseil d’Etat a rejeté le recours fondé contre la décision prise par le gouvernement de dérembourser les 4 médicaments « anti-Alzheimer » (Aricept, Ebixa, Exelon et Reminyl),  à l’été 2018. Nous regrettons cette décision du Conseil d’Etat qui semble d’ailleurs s’être concentré sur la forme, n’accordant que peu de place à l’analyse scientifique du service médical rendu par les médicaments indiqués dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée.
En tant que représentante des patients, des familles et des usagers du système de santé, dont elle ne cesse de recevoir de nombreux témoignages depuis le mois d’août 2018, France Alzheimer et maladies apparentées tient à rappeler ici ses craintes relatives au déremboursement. Ce positionnement rejoint celui des réseaux européen et international d’Alzheimer Europe et d’Alzheimer’s Disease International. Nous rappelons d’ailleurs que la France est devenue l’un des trois seuls pays de l’Union européenne à ne pas rembourser ces traitements, avec l’Albanie et la Lettonie.

Nous regrettons par ailleurs que les économies consécutives à la décision de déremboursement, tel que cela avait été annoncé par le gouvernement, n’aient toujours pas fait l’objet d’un arbitrage fléché vers le déploiement et le renforcement des dispositifs d’accompagnement non médicamenteux.

À quelques jours de l’échéance du Plan Maladies Neuro-Dégénératives 2014-2019 et alors que nous n’avons aucune visibilité à ce jour sur la suite qui sera donnée au Parcours Alzheimer, nous ne pouvons que partager l’inquiétude des millions de personnes concernées par la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées, quant à l’amélioration de leur prise en soins.

De notre côté, nous continuons sans relâche notre mission quotidienne auprès des personnes malades et de leurs familles, au travers de nos différents dispositifs de soutien et n’aurons de cesse de porter haut et fort leurs revendications.

*La Fédération des Centres Mémoire
La Fédération Française de Neurologie
La Société Française de Gériatrie et de Gérontologie
La Société de Neuropsychologie de Langue Française
La Société Francophone de psychogériatrie et de psychiatrie de la personne âgée
L’Union Nationale des Associations France Alzheimer
L’association des Neurologues Libéraux de Langue Française (ANLLF)
La Société Française de Neurologie (SFN)

 

 

Article paru dans le "Moniteur des pharmacies" (avec l'aimable autorisation de la rédaction)

 

Médicaments anti-Alzheimer : un déremboursement irrévocable

A l'été 2018, elles avaient contesté le déremboursement des médicaments à visée symptomatique de la maladie d’Alzheimer : plusieurs organisations de médecins et associations de patients viennent d’être déboutées par le Conseil d’Etat. Celui-ci a rendu publiques lundi 16 décembre deux décisions qui rendent ce déremboursement irrévocable.

Deux recours avaient été déposés auprès de la juridiction administrative suprême, émanant d’une part de fédérations et associations, dont France Alzheimer, la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG), la Fédération des centres mémoire ou encore la Fédération française de neurologie et d’autre part d’un interne en pharmacie. Dans les deux cas, il était demandé l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté pris par la ministre de  la Santé le 29 mai 2018, qui prononce le déremboursement des quatre principes actifs prescrits dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer : donépézil (Aricept), mémantine (Ebixa), rivastigmine (Exelon) et galantamine (Reminyl).

Les représentants des médecins et des patients faisaient valoir qu’un des membres de la commission de la transparence (instance de la Haute Autorité de santé chargée de donner un avis sur la prise en charge d’un médicament au vu de son service médical rendu) et deux des experts extérieurs sollicités ont pris publiquement position en faveur de ce déremboursement. Reconnaissant un manque de discrétion, le Conseil d’Etat estime que « cela n’est pas de nature à entacher d’irrégularités les avis rendus par la commission de la transparence ». De surcroît, il n’y a pas d’intérêt personnel ou de lien avec une entreprise intéressée aux résultats de l’examen des spécialités pharmaceutiques en litige, estime la haute juridiction.

Pour le Pr Pierre Krolak-Salmon, neuro-gériatre au CHU de Lyon (Rhône) et spécialiste de la maladie d’Alzheimer, qui avait porté la saisine pour la SFGG et d’autres sociétés savantes, « cette décision, décevante, va à l’encontre des publications scientifiques dans le monde, notamment dans la revue Cochrane, et des recommandations, notamment celles du National Institute for Health and Care Excellence au Royaume-Uni ». Cependant, reconnaît-il, « ce combat est derrière nous et nous avons maintenant une injonction à nous tourner vers l’avenir, à évaluer les nouveaux dispositifs de prévention de la maladie et suivre les nouveaux traitements en essai thérapeutique ».

Du côté des patients, on prend également acte à regret de ces décisions. Un sondage mené à l’automne 2018 auprès de 2463 proches aidants et 84 patients par France Alzheimer a montré que l’arrêt brutal d'un de ces traitements a entraîné dans la moitié des cas une aggravation précipitée des troubles cognitifs. De même, 70 % des familles n’envisageaient pas d’arrêter le traitement malgré son déremboursement, l’estimant en majorité efficace. Par ailleurs, dans seulement 55 % des cas, la consultation d’un spécialiste se poursuit malgré l’arrêt du traitement.

« Nous sommes bien entendu favorables aux approches non médicamenteuses de la maladie. C’est au cœur de nos actions. Mais on nous avait dit que les économies consécutives au déremboursement, soit 90 millions d’euros par an, seraient dirigées vers ces approches. Cela n’a pas été le cas », rapporte Benoît Durand, directeur général de France Alzheimer.

 

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