Interview du Pr Olivier Guérin, Vice-Président de la SFGG

La Ministre de la Santé et des Solidarités Agnès Buzyn a octroyé dans son plan santé une aide de 15 millions d’€ pour la prévention en Ehpad. Quelle est votre réaction ?

Nous, les professionnels de la médecine gériatrique et gérontologique, tenons bien sûr à saluer le geste de Mme Agnès Buzyn qui est ciblé sur la perte d’autonomie et l’aggravation de l’état de santé mais nous tenons rappeler que la prévention et l’accompagnement de la perte d’autonomie passent aussi par le financement des conseils départementaux. Or dans ce domaine la disparité départementale en matière de financement GIR est significative.

 

De quelle aide s’agit-il ?

Le conseil départemental (anciennement conseil général) est notamment en charge du versement de l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) et de l’ASH (aide sociale à l’hébergement). Il est également en charge de l’autorisation et du contrôle des services d’aide à domicile, des résidences-autonomie et des Ehpad. Il fixe les tarifs de prestations offertes par les établissements et services habilités. C’est aussi le conseil départemental qui délivre l’agrément aux accueillants familiaux pour personnes âgées et handicapées.

Quelles sont les disparités dont vous parlez ?

Les dispositions issues de l’article 58 de la loi prévoient que les financements versés par les conseils départementaux pour la prise en charge de la dépendance sont déterminés en tenant compte du niveau de dépendance moyen des résidents et de leurs besoins. Afin de ne pas alourdir la charge financière des conseils départementaux, la convergence des tarifs dépendance des EHPAD est organisée autour du tarif moyen départemental. Ainsi, chaque conseil départemental fixe annuellement la valeur du « point GIR », c’est-à-dire le nombre d’euros consacré pour chaque point de dépendance des résidents.
L’obligation de publier une valeur de point GIR départemental rend désormais très lisibles des politiques départementales. Et l’on remarque que tous les départements ne sont pas logés à la même enseigne et qu’il existe de grandes disparités entre départements. Les Alpes-Maritimes (5,68€), la Vienne (5,72€), les Bouches-du-Rhône (5,94€), la Haute-Corse (5,99€) sont les mauvaises élèves – ce sont les territoires les moins bien lotis (la valeur moyenne de points GIR départementaux est de 7€). Les mieux lotis sont la Corse du Sud (9,47€), la Martinique (8,86€) et le territoire de Belfort (8,40€) (source Mensuel des Retraites – n°203).
Ces disparités concernent tout autant les Ehpad que la vie et l’accompagnement à domicile.


Que préconisez-vous ?

Il faut que toute personne résidant en Ehpad en France puisse bénéficier du même niveau d’accompagnement, quel que soit le département où elle réside. Nous souhaitons une équité de traitement de nos aînés. Pour cela, il faut que l’état impose une harmonisation à la valorisation du point GIR à l’ensemble des collectivités territoriales, à un niveau suffisant. Le but est d’éviter d’avoir des écarts énormes entre plusieurs départements. Entre les Alpes-Maritimes et la Corse du Sud, nous sommes presque du simple au double ! La situation actuelle est une rupture profonde d’une valeur fondatrice de notre république : l’égalité des soins et de l’accompagnement sur notre territoire national.