Retour sur cette 2e journée des JASFGG 2018 tout aussi intense que la précédente tant par la fréquentation que par la diversité et la richesse des communications orales, symposiums et posters proposés.
Il est 12h25.
Paris est gris et pluvieux mais qu’importe, c’est à l’intérieur, dans l’espace devenu à présent presque trop étroit pour le congrès que cela se passe. 6 sessions, 4 « Journées des chercheurs », 3 communications orales, 3 « bonnes pratiques cliniques » et autant de posters à découvrir au sous-sol : le planning est chargé.
Tandis que l’on se demande dans les couloirs de l’espace conférence du Marriott si la salle plénière sera assez grande pour accueillir la foule des congressistes venus assister à la session sur la prise en charge de l’ostéoporose chez le patient âgé menée par le Pr Claude Jeandel, d’autres filent en vitesse à leur pause déjeuner avant de redémarrer leur long et studieux après-midi.
Car à 14h30 les affaires reprennent.
Les actualités en Infectiologie sont à l’ordre du jour : Gaetan Gavazzi et Emmanuel Forestier, modérateurs de la session invitent Marc Paccalin et Jean-Philippe Lanoix à monter sur l’estrade. Il est question du VIH chez les sujets âgés : le risque VIH existe-t-il toujours après 50 ans ? Quelle population touche-t-il ? Et quelle est l’espérance de vie ? Voilà des questions que ces médecins soulèvent. « Le risque VIH, surtout chez une population hétérosexuelle, existe toujours après 50 ans » déclare Jean-Philippe Lanoix, données à l’appui. « Leur espérance de vie augmente, au point qu’elle rejoigne peu à peu l’espérance de vie des adultes sans VIH (pour atteindre une espérance de vie de + de 73 ans) ». « Notre objectif est que les PVVIH (ici dites « personnes vieillissantes avec le VIH ») soient bien prises en charge par les gériatres et les infectiologues pour optimiser leur vieillissement. »
S’ils distinguent deux types de profils, le patient âgé qui contracte le VIH et le patient qui a contracté le VIH plus jeune et qui vieillit, les conséquences médicales sont les mêmes : leur tendance à développer une comorbidité et une fragilité précoce est grande et s’accroît d’année en année.
Et quid de leur dépendance ? « Leur taux d’admission en Ehpad reste très faible » selon Jean-Philippe Lanoix. Plusieurs enquêtes menées récemment ont en effet confirmé que les freins étaient nombreux : « alors que seulement 17% s’estiment réticents à les recevoir, 56% des établissements en vallée du Rhône ne s’estiment pas préparés à accueillir ces patients ». La raison ? Un manque de formation spécifique, un problème de coûts et toujours la peur de la contamination.
« Nos patients VIH vont avoir de moins en moins besoin d’infectiologues et de plus en plus besoin de gériatres. Nous les voyons une fois par an et ne parlons presque pas du virus tant ils vieillissent quasi normalement. Sur le plan infectiologique, le VIH pour la plupart d’entre eux ne pose guère plus de problème. Il est maintenant important que le gériatre prenne le relais pour soigner et prendre en charge ces patients de la meilleure des façons ».
L’assemblée applaudit, le message semble être passé.
Un peu plus tard vers 16h30 démarrait à l’Auditorium la session « Longévité, immortalité et transhumanisme » animée par Sandrine Andrieu. L’occasion de faire un point sur la révolution démographique que connaît la France (et bien d’autres pays) depuis plusieurs années.
Jean-Marie Robine, démographe, ouvre la séance en exposant les données, chiffres, courbes, tableaux et diagrammes à l’appui, de la révolution de la longévité des adultes.« L’espérance de vie a connu une augmentation fulgurante depuis la fin du 19ème siècle » annonce-t-il en préambule. Depuis 1950 l’augmentation de l’espérance de vie est plus régulière, gagnant 3 mois chaque année.« L’augmentation de la survie des personnes âgées est un phénomène tout à fait inédit » indique-t-il. « Et l’âge le plus fréquent au décès augmente régulièrement (76 ans en 1900 puis 90 ans en 2016). Depuis 1816 jusqu’en 1946, l’âge maximum au décès tel qu’indiqué par les données reste stable (autour de 99 ans). Depuis 1946, il augmente régulièrement pour atteindre 109 ans en 2016 soit 10 ans en 70 ans ».
Des conclusions que partage bien sûr Edouard Debonneuil venu présenter ses travaux sur la biologie du vieillissement. Croire en l’immortalité ? « Et pourquoi pas » répond-il.
« Le futur dépend de ce qu’il y a dans les cartons de la recherche actuelle. Il y a peu d’améliorations médicales dans le domaine des pathologies pulmonaires et les maladies telles qu’Alzheimer et Parkinson mais au niveau de la mortalité cardiovasculaire et les cancers il y a eu beaucoup d’améliorations. Et ces améliorations nous donnent la possibilité d’espérer ». Il a travaillé aux Etats-Unis avec des biologistes et a pu voir les choses spectaculaires réalisées sur les modèles animaux, souris et autres vers. « En changeant un gène on arrive à les faire vivre 10 fois plus longtemps ».
De là à appliquer ces avancées scientifiques chez l’homme il n’y aurait peut-être qu’un pas. « J’ai vu des centaines de manière d’allonger la vie. Peut-être que les souris ont un mécanisme de vieillissement différent du nôtre mais il y a des lueurs d’espoir. » Difficile pour autant de croire qu’un jour nous serons immortels mais libre à chacun de penser que l’on pourra vivre beaucoup plus longtemps.