Oui la maltraitance envers les personnes âgées existe.
Oui elle est absolument intolérable. Inadmissible. Inacceptable.
Mais non la France ne maltraite pas ses vieux.Faut-il rappeler que dans de nombreuses institutions tout se passe très bien ?
Faut-il aussi rappeler que l’avancée en âge se déroule en général en bonne santé, heureuse et autonome ?
Que la majorité des personnes âgées n'est pas dépendante ?De nombreux sexagénaires sont en pleine forme.
De nombreux septuagénaires ont une retraite paisible et active.
De nombreux nonagénaires n’ont pas d’incapacités majeures. Grâce aux soins qui leur sont apportés et qui se sont fortement améliorés. Grâce aux progrès de la médecine ces dernières années. Grâce encore aux compétences de plus en plus pointues des médecins, des infirmiers et de l’ensemble des professionnels qui les soignent et les accompagnent.Les personnels soignants qui entourent les personnes âgées sont dans la très grande majorité performants, bienveillants et passionnés par leur travail. Leur métier est difficile et c’est pour eux une source d’exigence. Leurs responsabilités sont immenses. Il est important qu’ils bénéficient enfin d’une valorisation financière et d’image tout autant que d’une formation adaptée. Leur formation est déterminante et la responsabilité collective est de la leur assurer afin d’éviter des soins inadaptés. N’oublions pas que la grande majorité des situations de maltraitance se situent à domicile et non en institution.
Par ailleurs, comme le souligne très justement le précédent avis du Comité Consultatif Nationale d’Ethique (CCNE), en confinant la vieillesse uniquement dans le champ de la santé, la société réduit les adultes âgés, en raison de leur âge, à leurs difficultés et non à leur potentiel. La première maltraitance, plus sourde, et peut-être bien plus insidieuse et violente, n’est-elle pas l’isolement et l’exclusion dans lesquels nous plongeons nos aînés ? Le regard que porte la société sur les personnes âgées n’est-il pas à revoir, à re-questionner et à réinventer ? Comment ne pas comprendre que l’utilité sociale dont sont privées petit à petit les personnes âgées à mesure qu’elles perdent leur autonomie les plonge dans un désarroi immense qui altère leur santé psychique et physique ?
La société porte un regard négatif sur le vieillissement qui, dans notre culture, est synonyme de déclin et non de longévité heureuse qui est une chance collective et individuelle. En focalisant son attention sur les personnes dépendantes, ce sont des millions de personnes vieillissantes mais non dépendantes qu’elle rend invisibles. Bannies. Rayées de la vie citoyenne. Plus le droit de travailler, plus le droit de cité. Le statut social des adultes âgés est fragilisé et les cicatrices de la vieillesse menacent de transformer la personne âgée en un être rejeté. Ceci aussi est inadmissible. Et notre responsabilité est collective.C’est notre rôle, NOUS, professionnels de la gériatrie et de la gérontologie, de valoriser l’avancée en âge et d’alerter, de VOUS alerter, sur les dangers du dénigrement et de l’exclusion des personnes âgées.
Notre regard doit changer.
Lire l'interview de Robert Moulias "La maltraitance contre les personnes âgées n'est pas celle que l'on croit"