Un collectif de fédérations a adressé le 2 mars dernier plusieurs propositions à Madame Brigitte BOURGUIGNON, Ministre déléguée auprès du Ministre des Solidarités et de la Santé, chargée de l’Autonomie, visant à assouplir les mesures sanitaires dans les établissements pour personnes âgées.

Le CNP de gériatrie ainsi que les représentants médicaux de certains groupes d’EHPAD s’associent, sans réserve, aux souhaits exprimés par ce collectif de voir se rétablir une vie « normale » au sein des EHPAD, dès que les conditions sanitaires le permettront.
Cependant, si tout doit être mis en oeuvre afin de restaurer le plus rapidement possible, les relations habituelles entre les résidents et leurs familles ou proches, et les sorties en dehors des établissements (que les équipes des EHPAD s’attachent à préserver depuis maintenant un an par divers moyens), les gériatres attirent l’attention sur la nécessité d’assortir l’allègement des mesures sanitaires à un certain nombre de conditions.

Ils mettent en effet l’accent sur des éléments à prendre en compte relevant, pour certains, d’un contexte évolutif et variable selon les territoires et, pour d’autres d’incertitudes persistantes ou de niveaux de preuve encore insuffisants. Il en va ainsi, de la persistance d’une circulation virale intense en France, des incertitudes inhérentes aux variants, de la survenue de clusters touchant des EHPAD au sein desquels les résidents ont pourtant reçu deux doses de vaccins, des évolutions parfois mortelles d’infections Covid survenant chez des sujets pauci-symptomatiques ou encore de la non certitude d’une réponse vaccinale protectrice chez des résidents dont l’âge élevé, les polypathologies et la fréquente dénutrition constituent autant de facteurs susceptibles d’altérer la réponse et donc l’efficacité vaccinales.

Ils recommandent avant tout de n’engager de telles mesures d’allégement que dès lors que la couverture vaccinale a atteint le taux minimal de 80 % de résidents après la seconde dose et en respectant un délai minimum de deux semaines après cette dernière.

Ils incitent à faire de l’évaluation du risque résiduel épidémique post-vaccinal un préalable à l’application des mesures d’assouplissement intégrant plusieurs critères tels que le nombre de résidents non vaccinés (par choix ou contre-indication médicale) ou non encore vaccinés (nouveaux entrants, vaccina(on différée pour contre-indication relative temporaire) et le taux de professionnels non vaccinés.

Ils soulignent en effet que le risque résiduel de pénétration virale reste encore élevé du fait d’un faible taux de vaccination des soignants et des familles et incitent à ce que le plus grand nombre de personnes en contact avec les résidents d’EHPAD puissent bénéficier de la vaccination tout en regrettant que cette dernière n’ait pas été rendue obligatoire pour les personnels en contact étroit avec les résidents.

Ils recommandent de tenir compte du taux d’incidence et de l’indice de circulation virale du territoire, du taux et du type de variants circulants et de réévaluer régulièrement ces critères afin d’adapter les mesures d’assouplissement pouvant, le cas échéant, se traduire par une « marche arrière » de ces dernières.

Ils rappellent la nécessité de maintenir les modalités de protection des résidents non vaccinés et des salariés.

Ils proposent qu’une gradation des assouplissements soit envisagée après analyse de ces éléments et en fonction de l’organisation spécifique de chaque établissement (sectorisation, particularités de l’architecture, personnels dédiés par unités...).

Soutenant le principe d’un « pacte de responsabilité partagée » évoqué par le collectif cité précédemment, les gériatres insistent sur la place centrale de l’expertise gériatrique avant l’élaboration des procédures d’assouplissement.
Enfin, ils rappellent que les médecins coordonnateurs fondent leur exercice sur la définition de la santé promulguée par l’Organisation Mondiale de la Santé et la traduisent ainsi pour les résidents d’EHPAD : La santé d’un résident en EHPAD ne peut se limiter à l’absence d’infection COVID !. Dans le contexte, actuel, elle impose à la fois le renforcement de la prise en soin des co-morbidités et la prévention de l’ensemble des risques liés au confinement des résidents. L’expertise gériatrique est centrale et constitue une étape indispensable à une stratégie équilibrée.

La réflexion éthique dans les établissements accueillant des citoyens âgés s’appuie sur un travail pluriprofessionnel, garant de notre capacité à protéger sans isoler.

 

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