Les personnes âgées peuvent ressentir de l’anxiété ou des symptômes dépressifs qui varient en intensité ou en sévérité.

Traiter rapidement et efficacement ces troubles de l’humeur permet de limiter des conséquences lourdes pour le quotidien des personnes âgées comme la détérioration du bien-être général, la dépression et l’isolement, la sur-utilisation des services de santé, la surconsommation de psychotropes et l’augmentation du risque de mortalité.

Les thérapies comportementales et cognitives (TCC) présentent de nombreux atouts pour traiter ces symptômes gériatriques.

Le point avec Anne-Julie Vaillant Ciszewicz, psychologue clinicienne spécialisée en gérontologie.

 

 

Pourquoi recommander une thérapie chez une personne âgée ?

Les TCC sont recommandées chez les personnes âgées pour:

  • Les troubles de l’humeur (anxiété, dépression, apathie, etc.)
  • Apprendre à mieux gérer ses émotions par un travail sur les pensées et les comportements
  • Certaines pathologies mentales vieillissantes (troubles de la personnalité)

Les TCC peuvent s’appliquer même en cas de faible déclin des fonctions cognitives (attention, mémoire etc).

 

Quelle est la différence entre TTC et psychothérapie ?

La psychanalyse peut s’étendre sur plusieurs années ; les TCC, comme la psychothérapie EMDR, sont identifiées comme des thérapies « brèves ». Cependant, il est important de préciser que chez les personnes âgées le rythme global de la thérapie devra s’adapter et sera par conséquent sera plus « lent ».

Lors d’une TCC le professionnel de santé veillera à poser un diagnostic au regard des classifications des maladies en vigueur. Il présentera ce diagnostic au patient afin de lui donner le plus d’informations possible sur le trouble (psychoéducation). Il aura recours à des échelles cliniques (comportementales ou de l’humeur) afin de mettre en place une « ligne de base ». Ce premier point permettra de réévaluer les progrès du patient en cours de thérapie et donc s’assurer d’effets thérapeutiques précis concernant le ou les symptômes traités.

Les TCC peuvent également se pratiquer en groupe notamment chez les personnes âgées en hôpital de jour ou des groupes de psychoéducation sur la dépression permettent une amélioration des symptômes. Dans le cadre des pathologies neurocognitives en EHPAD, il est possible pour un professionnel formé au TCC de proposer des groupes de psychoéducation à destination des aidants (mari, femme, enfants etc.) afin de mieux comprendre la maladie, d’adapter son système de communication et de mieux gérer ses propres émotions face à la maladie de l’autre. Les groupes TCC sont toujours évalués et requièrent ce critère… À ne pas confondre donc avec un groupe de parole !

-> Le médecin traitant peut tout-à-fait diriger un de ces patients âgés vers un professionnel de la santé mentale qui inscrit sa pratique dans ce type de thérapie (psychologues, médecins psychiatres). Et bien entendu les gériatres et autres professionnels de la gériatrie et gérontologie peuvent être des prescripteurs à part entière.


Quelles sont les angoisses les plus répandues chez les personnes âgées ?

  • l’angoisse de mort
  • l’anxiété en lien avec une baisse des performances cognitives ou physiques (je ne suis plus « capable de faire cela comme avant »).
  •  le deuil peut entraîner des composantes anxiogènes
  • le Trouble de Stress Post Traumatique (TSPT) est également présent dans cette population alors que sous-diagnostiquée (il fait d’ailleurs l’objet d’un groupe de travail de la SFGG).

Pour les personnes âgées en institution (EHPAD), les angoisses les plus fréquentes sont :

  • l’angoisse vespérale (à la tombée de la nuit)
  • l’angoisse de séparation avec l’aidant.
  • l’angoisse généré par un environnement non adapté.

-> Plus les troubles cognitifs sont présents et plus les personnes âgées seront sensibles à leur environnement (bruits, lumières, communication, non reconnaissance de son image ou du lieu ou elles se trouvent). Les repères sont extrêmement importants chez les personnes âgées : tout changement de ses repères peut conduire à des angoisses tout comme les évènements de vie très marquants (perte d’un enfant, chute, accident etc.). 

 

Combien de temps dure une thérapie ?

Il est vrai que l’on parle de thérapies brèves comme pour l’EMDR ou encore l’hypnose (très efficace également chez les personnes âgées) mais tout dépend du patient, de la bonne entente thérapeutique soignant-soigné (ce que nous appelons l’alliance thérapeutique) et de l’engagement du patient dans la thérapie. En général nous prescrivons entre 10 et 12 séances de 45 à 60 mn. Pour une personne âgée il faudra rajouter quelques séances.

 

Des exercices peuvent-ils être faits à la maison ?

 Les tâches à domicile peuvent être de différentes natures et seront adaptées en fonction du patient et de son objectif de thérapie. Par exemple un patient âgé anxieux pourra apprendre en séance des techniques de relaxation qu’il devra reproduire à domicile pour mieux gérer son anxiété. Il s’agit d’un entrainement quotidien vers l’objectif de mieux gérer ses émotions.

Un patient dépressif dont le fonctionnement s’ancrerait dans des ruminations mentales (« je ne sers à rien », « je suis incapable ») pourrait avoir comme tâche à domicile un travail sur les pensées et leurs valences émotionnelles afin d’apprendre à les repérer en situation du quotidien et de pouvoir critiquer les « pensées automatiques » ou des distorsions cognitives en faveur de nouvelles « pensées alternatives ».

De plus en plus de patients âgés qui consultent en psychothérapie découvrent les exercices basés sur la méditation pleine conscience. La pleine conscience constitue en soi un excellent entrainement attentionnel pour les personnes âgées et en plus elle aura un effet sur nos télomères ! Elle permet de développer plus de flexibilité mentale et de s’inscrire dans une vision différente de la vie, « dans l’ici et le maintenant ». Nombre des nos patients âgés pratiquent la pleine conscience après l’avoir découvert en psychothérapie. D’autre part, des groupes de méditation pleine conscience se développent dans certains EHPAD tant pour les résidents que pour les soignants. Les TCC de troisième vague sont centrées sur ces applications thérapeutiques pour cesser de « lutter » contre les pensées ou émotions négatives, en s’inscrivant dans des actions engagées vers ce qui est important pour nous (thérapie ACT).

La plupart du temps, les personnes âgées qui consultent et qui ont déjà bénéficié d’un suivi thérapeutique classique sont surprises par la démarche TCC (la mise en place d’objectifs, l’évaluation, l’exposition, la relaxation etc). Il s’agit donc d’être explicite, dynamique et concret dans nos explications sur la TCC. TCC, EMDR, HYPNOSE… la relation thérapeutique est au cœur de toutes psychothérapies.

 

 

À NOTER

15 à 50% des sujets âgés ne sont pas détectés (source).
La dépression n’est pas une conséquence de l’âge mais plutôt des comorbidités associées à l’avancée en âge.

 

Allez plus loin :

http://www.scilogs.fr/psycho-info/focus-clinique-lutilisation-des-tcc-chez-le-sujet-age/
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