CONSULTATIONS MÉDICALES GRATUITES À 25, 45 ET 65 ANS : UN CAMOUFLET POUR LE VIEILLISSEMENT EN FRANCE

Comment ne pas réagir face à une mesure qui oublie les plus âgés ?

Annoncées dimanche par le ministre de la Santé François Braun, les consultations médicales gratuites tous les 20 ans aux trois âges de la vie, 25 ans, 45 ans et 65 ans seraient mises en place dans le but de “renforcer le volet prévention du système de santé français”. Pour les adultes âgés de 25 ans, il s’agira de faire le point sur les vaccins, leur activité physique et leur risque cardio-vasculaire. Pour les 45 ans, le dépistage du cancer du sein, du côlon et de la prostate en plus de l’activité physique et la santé mentale. À 65 ans, la prévention d’autonomie, le dépistage des cancers et autres maladies.

 

La prévention ne s’arrête pas à 65 ans : elle doit être poursuivie à tout âge

Cette mesure qui met en avant une médecine de prévention trop souvent délaissée est une bonne mesure et nous la saluons. Mais qu’en est-il des plus âgés ? On ne vieillit plus en France après 65 ans ? Si nous suivons la logique de 20 ans entre chaque consultation ne devrait-il pas y avoir une consultation gratuite à  85 ans ? En tant que gériatres nous savons qu’il est possible de faire de la prévention passé 65 ans et qu’elle est utile (notamment sur les risques de chute, sur les troubles de la mémoire, la malnutrition, la dépression ou encore la vaccination contre la grippe, le pneumocoque, le zona qui évite des complications parfois mortelles). Et que dire de l’activité physique qui, selon le ministre, disparaîtrait à la consultation des 65 ans alors que l’on sait très bien que, comme le lien social, elle est une composante essentielle du vieillissement en santé ! Soulignons enfin que la perte d’autonomie qui serait un “axe fort” lors de la consultation des 65 ans est loin d’être une priorité pour un sénior actif qui, aujourd’hui, jongle entre la garde de ses petits-enfants, les loisirs, ses activités sociales et le soutien de ses parents qui, eux, ont atteint le vrai âge de la perte d’autonomie…

Alors devons-nous une nouvelle fois constater qu'iI ne fait pas toujours bon vieillir en France ? Ne pas proposer une consultation après 65 ans est au mieux une méconnaissance des solutions aux problématiques liées au vieillissement de la population, au pire l’aveu que rien n'est prioritaire ou efficace dans le grand âge… Démarrer un mandat avec un projet de loi aussi âgiste est un très mauvais signal envoyé à la population (c’est-à-dire aux 13,4 millions de personnes âgées de + de 65 ans) et aux professionnels de santé qui œuvrent chaque jour dans le champ du vieillissement (qui ont encore du mal à digérer la promesse non tenue de la loi Grand Âge).

Pour une consultation de prévention à 75 ans et 85 ans

Si ce quinquennat s’annonce bien comme celui d’une “vaste réforme de notre politique de santé et de prévention” comme l’a annoncé le Ministre de la Santé en début du mois, alors il ne faut oublier personne. À l’heure où le gouvernement légifère sur la fin de vie, il serait anormal, insensé et proprement discriminatoire d’oublier le grand âge.

C’est pourquoi nous, gériatres, demandons la mise en place d’une consultation de prévention à 85 ans pour que chaque frange de la population ait le même droit : celui de prendre soin de sa santé à tous les âges, à 20 ans comme à 80 ans. Créer cette consultation à 85 ans mettrait les patients âgés sur un pied d'égalité dans une même dynamique de prévention solidaire. Mieux, créer également une consultation à 75 ans traduirait l'ambition d'anticiper les nombreux problèmes du grand âge, en fixant un calendrier de prévention plus resserré, prenant en compte les capacités diminuées des patients âgés à faire face à une complication qu'on aurait pu et dû prévenir.

 

Pr Cédric Annweiler, gériatre
Pr Jacques Boddaert, gériatre
Pr Sylvie Bonin-Guillaume, gériatre
Pr Gaëtan Gavazzi, gériatre
Pr Olivier Guérin, gériatre
Pr Claude Jeandel, gériatre
Pr Éric Pautas, gériatre
Pr Nathalie Salles, gériatre
Pr Dominique Somme, gériatre

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