Aux journées annuelles de la SFGG, le collège des soignants a mis à l'honneur la recherche canadienne. Deux études relatives aux personnes âgées montrent l'application pratique des travaux de recherche en sciences infirmières et santé communautaire.

Le collège des soignants de la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG) a invité ce 9 novembre deux infirmières à présenter leurs travaux de recherches doctorales ciblant les personnes âgées et menés au Canada. En France, la non-reconnaissance officielle des infirmiers de pratique avancée dédiés au grand âge complique le déploiement de telles études. Les sources de financements des thèses en sciences infirmières manquent en général, et en particulier concernant la gériatrie et la gérontologie, indique à Hospimedia Pascal Lambert, membre du collège soignant, en marge de la table ronde.

Le refus de soins en question

Pour autant, les présentations des deux oratrices ont montré des applications concrètes de leurs travaux auprès des plus âgés. Sylvie Rey, docteur en sciences infirmières, a soutenu en mai dernier sa thèse à l'université du Québec à Trois-Rivières. Elle est actuellement chargée d'études à l'université de Laval (Québec). Son sujet de thèse a porté sur l'expérience au cours des soins corporels des personnes atteintes d’une maladie neurocognitive. Il s'agit d'une étude d'intervention infirmière, a-t-elle expliqué. Elle est partie du constat que les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer peuvent vivre mal le temps des soins, manifestant différentes réactions verbales, vocales et physiques, communément considérées comme des comportements de résistances. L'analyse bibliographique a démontré que peu d'études s'interrogent sur ce que ressentent vraiment les malades d'Alzheimer, se focalisant principalement sur leurs comportements de refus de soins. Ces travaux se caractérisent aussi par le fait qu'ils ne sont presque jamais portés par des soignants et que leurs proches y sont peu impliqués.

Une recherche pour les infirmiers

Au contraire, Sylvie Rey a choisi de positionner son étude comme "une recherche infirmière menée pour et par une infirmière". Elle s'est appuyée sur la théorie du déficit d'autosoin de Dorothea Elizabeth Orem, prenant en compte la capacité de soin de l'aidant et aussi la prise en compte des facteurs contextuels. Dans une première phase, Sylvie Rey a observé les professionnels d'un établissement réaliser les soins corporels de neuf résidents (soit vingt-neuf observations et quatorze entrevues avec des proches aidants et des soignants). À partir de ces données, la chercheuse a élaboré une échelle de dix tonalités représentant les visages des résidents allant du bien-être à la situation maximum d'inconfort. La deuxième phase de l'étude a permis de qualifier les soins réalisés du point de vue des résidents, des proches et des professionnels.

Sylvie Rey a pu apporter son regard d'infirmière. Il ne suffit pas, selon elle, de se contenter de dire aux soignants (infirmiers et aides-soignants) ce qu'ils doivent faire pour que le geste soit bien réalisé. "Il est primordial de les accompagner." Elle souligne par exemple qu'un geste effectué trop rapidement peut être mal vécu par l'âgé et seul un œil extérieur peut prévenir le professionnel quand le patient ne peut plus s'exprimer. Il ressort aussi des observations de la chercheuse que les principaux motifs d'inconfort lors des soins corporels des âgés sont : la douleur encore mal gérée, le froid, la peur, les facteurs environnementaux (les bruits), les questions de matériel, le rythme des soins et le manque de communication. Concernant le temps passé à accompagner les soignants, la chercheuse estime que celui-ci permet d'optimiser par la suite les pratiques. La recherche et l'application de l'échelle des tonalités sont restées limitées au terrain d'étude. Elle est actuellement en phase de développement et doit encore être validée.

Un environnement stimulant

De son côté, Élodie Montaigne prépare un doctorat en santé communautaire à l'université de Laval. Infirmière libérale en France pendant plusieurs années, elle est diplômée d'une maîtrise santé expertise en gérontologie de l'université Paris-Sorbonne. Elle a rejoint le Canada pour participer à une recherche en santé communautaire destinée à déterminer comment utiliser la décision partagée dans un programme de promotion de la santé. La recherche a démarré en 2021 et est donc encore en cours. Elle déclare avoir trouvé au Canada un environnement de recherche stimulant. De part ses expériences antérieures, elle sait comment aborder les aînés dans leur environnement de vie. L'étude vise en effet à analyser les déterminants de nouvelles habitudes de vie issues du programme Vieillir en santé. L'échantillon d'étude concerne des personnes de résidences privées pour aînés (l'équivalent des résidences autonomie françaises). Elle souligne que cette recherche sort de la discipline infirmière.

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